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2023 05 29
En Turquie George Soros pariait sur la victoire de Kemal Kiliçdaroglu. Présidentielle en Turquie : le président sortant Recep Tayyip Erdogan en tête du second tour après le dépouillement de 95% des bulletins, selon l’agence officielle
Luc Michel, géopoliticien, s’exprime sur ce sujet.
APRES LA VICTOIRE D’ERDOGAN EN TURQUIE, UNE NOUVELLE ERE D’INCERTITUDES
Le chef de l’Etat turc a remporté ce dimanche la victoire au second tour de l’élection présidentielle, malgré l’union inédite de ses opposants. Il est réélu pour cinq ans.
Une courte déclaration – six minutes à peine – pour remercier ses partisans et dire sa «profonde tristesse face aux difficultés encore plus grandes qui attendent le pays». Dimanche soir, tandis que l’opposant Kemal Kiliçdaroglu lisait son discours de défaite, le siège de son Parti républicain du peuple (CHP) à Istanbul se vidait rapidement.
Le chef de l’Etat, au pouvoir depuis plus de vingt ans, a récolté dimanche 52% des voix. Indétrônable, Erdogan remporte l’élection présidentielle.
L’inquiétude immédiate concerne l’économie. La banque centrale, privée de toute indépendance, a dilapidé ses réserves de change pour empêcher une chute de la livre, la monnaie turque, avant les élections. Ses réserves sont même dans le rouge, une première depuis 2002. Anticipant un choc monétaire et pour protéger leur épargne, de nombreux Turcs ont fait la queue devant les bureaux de change pour acheter des devises dans les semaines précédant le scrutin. La crainte est que la banque centrale ne parvienne plus à soutenir la livre, dont la dégringolade entraînerait à coup sûr une nouvelle flambée de l’inflation. Cette crainte est d’autant plus fondée que Recep Tayyip Erdogan a affirmé pendant sa campagne qu’il ne reviendrait pas sur sa politique de baisse des taux directeurs, alors que l’orthodoxie économique commande au contraire une hausse des taux pour réduire l’inflation.
LE PARLEMENT LE PLUS NATIONALISTE DE L’HISTOIRE DE LA REPUBLIQUE
Dans l’intervalle, il y a toutefois peu de doutes quant au fait que le nationalisme et le conservatisme continueront de diriger le pays et de dominer son discours politique. Le parlement issu des législatives du 14 mai est le plus nationaliste de l’histoire de la République, qui fête son centenaire cette année. Recep Tayyip Erdogan se maintient au pouvoir grâce à une alliance de partis ultranationalistes et islamistes.
Ce nationalisme qui mêle ethnicité (turque) et religion n’a certes rien d’une nouveauté. La Turquie en est imprégnée depuis des décennies. «Mais il est clair que le nationalisme régnera sans partage dans les années à venir», prédit Oguz, électeur du Parti de la justice et du développement (AKP), dirigé par Recep Tayyip Erdogan. «Je pense que l’AKP ne survivra pas à Erdogan, mais que les nationalistes créeront à terme leur propre alliance, et que de cette alliance émergera un nouveau leader», ajoute Oguz, qui décrit les cinq ans à venir comme «un mandat de transition».
Recep Tayyip Erdogan, 69 ans, a laissé entendre plusieurs fois que ce mandat serait son dernier. En attendant, il se concentre sur son prochain objectif politique: la reconquête d’Istanbul et d’Ankara, les deux plus grandes villes turques dirigées depuis 2019 par l’opposition. Des élections municipales auront lieu dans dix mois.
LA VICTOIRE D’ERDOGAN EST CELLE DU NATIONALISME
Dans le contexte de révolution conservatrice que connaît le monde, le professeur à l’IHEID Jean-François Bayart décortique pour Le Temps (Genève) à l’aune du nationalisme : « la victoire de Recep Tayyip Erdogan à l’élection présidentielle turque est celle du nationalisme »
LES USA ET L’EUROPE DE BRUXELLES FACE AU «NOUVEL» ERDOGAN
Au terme de la réélection du président turc, rien n’indique que les relations s’apaiseront entre Recep Tayyip Erdogan et ses alliés occidentaux.
Le monde des relations internationales est loin aujourd’hui d’être idéal. Tayyip Erdogan fêtait ce week-end sa nouvelle victoire en promettant à ses électeurs de les accompagner «jusqu’à la tombe». La campagne électorale a été l’occasion de toutes les surenchères, et de toutes les assertions nationalistes. Rien n’indique que le nouvel Erdogan sera fondamentalement différent.
Sur le plan international, le premier test consistera en l’adhésion de la Suède à l’OTAN, qu’Erdogan a bloquée jusqu’ici. La politique de puissance jouée par la Turquie, au croisement entre l’Europe, l’Asie, le Proche-Orient et l’Afrique du Nord, embarrasse désormais au plus haut point ses alliés, bien davantage que ses adversaires. La balle, comme on dit, est aujourd’hui dans le camp des Occidentaux. Avec cette interrogation: comment éviter l’éloignement de la Turquie, tout en montrant une fermeté claire vis-à-vis de son dirigeant adoubé par les électeurs?
A la vérité, dans le paysage inconnu qui accompagne la guerre en Ukraine, cette question est devenue centrale, avant tout pour les Européens. Toutes proportions gardées, elle se pose à l’égard de la Russie de Vladimir Poutine, de la plupart des Etats arabes et africains proches de l’Occident, mais aussi au sein même de l’Union européenne vis-à-vis de pays tels que la Hongrie et la Pologne. Au sortir du scrutin turc, avec des conséquences qui se prolongeront peut-être «jusqu’à la tombe», les ambiguïtés et les accommodements dont se sont satisfaits les Occidentaux peuvent difficilement se convertir en gouvernail d’une stratégie de long terme.
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